4) le clonage


      Le clonage nous aide à comprendre les mécanismes du vieillissement. Quelques mois après l'annonce du premier mammifère cloné Dolly, les créateurs de l'Institut Roslin avaient constaté des signes de vieillissement prématurés des cellules de la brebis cloné. Les chercheurs reconnaissaient alors comme possible la mort prématurée de leur créature.
      Les télomères de Dolly sont plus courts que ceux observés chez une brebis du même âge. Le compteur biologique des cellules de Dolly n'avait pas été remis à zéro, mais semblait plutôt pointer l'âge de sa mère.
      En avril dernier, la société américaine Advanced Cell Technology a utilisé la même technique pour cloner six vaches. A la surprise générale, ces six animaux semblèrent avoir subi une bien étrange cure de jouvence. Leurs télomères apparaissent plus longs que ceux d'animaux du même âge et même plus longs que ceux d'un nouveau-né. Selon les chercheurs de la société américaine, si le mécanisme cellulaire se transfère à tout l'organisme, il serait alors possible d'obtenir un animal qui aurait une plus grande espérance de vie, et pourquoi pas des patients qui atteindraient des âges canoniques? Pour l'instant, du fait de barrières techniques et éthiques, cette perspective reste du domaine de l'hypothétique.


Document.1 - Coprs naturalisé de Dolly.

      Comment le clonage peut-il aboutir à deux résultats aussi opposés? La science ne semble pas encore donner de réponse très claire à cette question. Mais déjà, de nouvelles perspectives thérapeutiques s'ouvrent en matière de transplantation.

      Jusqu'à présent, cloner un animal nécessiterait de disposer d'ovocytes. Mais une nouvelle méthode permet de s'en dispenser. Elle fait appel aux cellules souches pluripotentes induites pour créer des clones d'un nouveau genre. La souris Tiny et quelques congénères nés en 2009 deviendront-ils un jour aussi célèbres que la brebis Dolly? La brebis Dolly née en 1996, elle fut le premier mammifère conçu par clonage dit somatique, son embryon avait été créé par fusion entre une cellule différenciée provenant d'une brebis adulte, et un ovocyte préalablement énucléé. Dolly avait donc le même patrimoine génétique que la brebis adulte donneuse de cellule.
      Quant à Tiny, elle a également été créée à partir d'une cellule différenciée, mais sans qu'il soit fait usage d'ovocyte, grâce à l'utilisation de cellules appelées cellules iPS. Courant 2009, trois équipes concurrentes ont montré, avec la naissance de Tiny, qu'il est possible d'obtenir des clones d'un nouveau genre à partir de ces cellules.


Document.2 - CLonage, obtention de souris iPS

      Les cellules iPS ont vu le jour en juin 2006 par la découverte de deux chercheurs japonais de l'université de Kyoto, ils prouvent qu'il est possible de reprogrammer des cellules adultes, différenciées, pour les ramener au stade de cellules souches embryonnaires. En particulier, comme ces dernières, les cellules reprogrammées sont pluripotentes. Cela leur vaut le nom de cellules iPS, acronyme anglais de cellules souches à pluripotentes induites.
      Le plus surprenant est que cette reprogrammation tient à peu de chose, l'expression de quatre gènes seulement. Et cela, tant chez des cellules de souris que des cellules humaines (les premières iPS humaines sont produites fin 2007). En pratique, la recette de Yamanaka consiste à introduire ces quatre gènes dans des cellules adultes en culture, en utilisant des rétrovirus. Ces gènes vont s'intégrer dans le génome des cellules traitées. Au fil des jours, certaines de ces cellules perdent leurs caractéristiques de cellules différenciées et deviennent pluripotentes.

      En seulement deux ans, la méthode des cellules pluripotentes a rapidement un succès important, chacun y voyant la possibilité de travailler avec ces cellules sans les contraintes inhérentes aux cellules embryonnaires, dont l'obtention implique la destruction d'embryons.

      De très nombreux lignées de cellules iPS sont en particulier produites à partir des cellules prélevées sur des patients affectés de telle ou telle maladie génétique, pour être ensuite différenciées in vitro. L'objectif visé est d'obtenir le type cellulaire affecté par la maladie afin de mieux comprendre les tenants et aboutissants cellulaires de celle-ci. Par exemple, les cellules iPS provenant de patients atteints de chorée de Huntington sont différenciées en neurones.

      Reste que la nature des cellules iPS continue de susciter des interrogations. Sont-elles vraiment l'équivalent de cellules souches embryonnaires? Certes, on sait qu'elles peuvent se différencier en tout type cellulaire d'un organisme.
      La preuve en a été fournie par la création d'embryons chimères qui sont des embryons conçus par fécondation, et dans lesquels, au bout de quelques jours de développement, on injecte quelques cellules iPS.
      Les animaux qui naissent ont des tissus chimériques, formés de cellules descendantes de l'embryon initial et de cellules descendantes des cellules iPS peuvent-elles, comme les cellules embryonnaires, engendrer à elles seules un animal entier ? En pratique, cette démonstration passe par un test au nom barbare, le test des embryons tétraploïdes.
      Un embryon tétraploïde est un embryon auquel on fait subir un choc électrique à un stade très précoce, quand il n'a encore que deux cellules. Ce choc électrique entraîne la fusion des deux cellules en une seule, qui possède donc deux fois plus de chromosomes que la normale. L'embryon ainsi modifié se développe quelques jours jusqu'au stade de préimplantation dit blastocyste. Mais l'excès de chromosomes fait qu'après implantation dans l'utérus d'une mère porteuse, le développement s'arrête. Seul le placenta et les autres annexes embryonnaires se forment, pas l'embryon proprement dit.

      A l'heure actuelle, des chercheurs ont mené des expériences décevantes aussi. Le principe du test des embryons tétraploïdes est d'injecter des cellules souches dans ces blastocystes stériles, et de voir si elles engendrent un animal. L'expérience fonctionne avec des cellules embryonnaires.
      Mais en 2007, Rudolf JAENISCH, avait rapporté qu'avec des cellules iPS les embryons n'allaient pas au bout de leur développement. Il avançait du coup deux hypothèses, soit les cellules iPS n'étaient pas vraiment pluripotentes, soit il fallait être plus persévérant dans l'effort. Ses tentatives sont réussies. Sa seconde hypothèse était bonne.
      C'est leur persévérance qui, en 2009, a conduit au succès des chercheurs chinois, de l'institut zoologique de Pékin et de l'institut des sciences médicales de Shanghai, la multiplication des tentatives a payé : 31 souriceaux sont nés chez des chercheurs chinois, et 29 chez Baldwin. Pour un nombre total d'embryons de respectivement 1 554,387 et 1 378.

      Le rendement est faible, mais il est du même ordre de grandeur que celui obtenu avec des cellules embryonnaires. Et même si l'on peut apporter un bémol à ce succès (les cellules iPS utilisées ont été fabriquées à partir de cellules différenciées provenant non pas d'animaux adultes, mais de souriceaux encore dans l'utérus), une barrière importante a néanmoins été franchie.

      Succès d'un côté, donc, mais inconfort de l'autre, le fait est que la méthode décrite ci-dessus aboutit à la naissance des clones. Des clones plus clone que ceux obtenus par clonage somatique, puisque l'intégralité de leur patrimoine génétique (ADN mitochondrial inclu) est celui de la cellule différenciée dont ils descendent. Tout bien considéré, les cellules iPS vont peut-être, elle aussi, entrer dans le champ des questionnements éthiques.